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J’étais à Quillan cette semaine pour la dernière « concertation » avant la création du Parlement de la Montagne. Il ne restait qu’à mettre les points sur les i.
Il s’agit de donner une voix aux acteurs – qu’ils soient institutionnels ou simples habitants – dans les zones montagneuses de la région Occitanie. Selon Carole Delga, la présidente : « Le but est d’avoir un lieu d’échanges et de propositions, pour que les politiques régionales soient adaptés aux besoins de chacun. »
Et le poids de la montagne n’est pas insignifiant :
- 55% de la superficie régionale
- 20% de la population soit 1,13 million d’habitants
- 47% des communes, soit 2153 au total
Auparavant la région avait organisé sept réunions locales et une plateforme internet desquelles ressortaient cinq mille propositions (avec quelques doublons, bien sûr) ! Par la suite, elle a vanné cette récolte pour arriver à la réunion de synthèse à Mazamet en Septembre dernier avec vingt-quatre grains en or. À la fin de cette réunion, suite à un vote, ils n’en restaient que cinq propositions à mettre en œuvre courant 2018. Car la région voit ce parlement comme « une force de propositions ».
Et maintenant il était temps de faire valider ces cinq lauréates, cinq autres qui ont besoin d’être approfondies en 2018, et encore quatre propositions remises à 2019.
Champ d’action
Elle est curieuse cette montagne occitane. D’abord parce qu’il y en a deux : le Massif Central et les Pyrénées. Soit. Les deux massifs partagent certaines problématiques et peuvent profiter des expériences différentes.
Mais ces montagnes débordent largement la superficie de la région. On comprend très bien que la région Occitanie ne peut pas s’emparer des prérogatives des autres collectivités, voire d’autres pays, mais à Quillan personne ne reconnaissait ouvertement les problèmes et les opportunités que représente cette situation.
Pour ne parler que de la faune sauvage des Pyrénées, il est évident qu’elle ne connait pas de frontières. L’ours Goiat, quoique lâché en Espagne en 2016, s’approvisionne souvent en France. Moins controversée, la réintroduction du bouquetin, quant à elle, se fait grâce à la Stratégie Pyrénéenne de Valorisation de la Biodiversité qui lie la France, l’Andorre et l’Espagne.
Quoique personne ne parlât des Pyrénées outre-Occitanie, un participant soulignait l’intérêt d’étudier d’autres montagnes. C’était Charles Pujos, Commissaire du massif des Pyrénées, le représentant de l’État.
« On peut questionner le modèle économique des stations pyrénéennes. On a un taux de résidences secondaires de plus de 80%. Ce qui veut dire que les revenus [des locations] sortent de la montagne. En Italie et ailleurs en Europe ils sont plus orientés vers l’accueil chez l’habitant. »
Deuxième constat inquiétant :
« En Savoie la perte de lits touristiques est de l’ordre de deux à trois pourcent par an. »
Un autre intervenant signalait la possibilité d’apprendre des pays en voie de développement.
Évitons le nombrilisme ! Regardons le monde ! Et que l’on encourage la participation hors-Occitanie.
Ambiance
Avant la séance la région nous a régalés avec un « lunch ». Heureusement, car la plupart des participants a fait plus d’une heure et demi de route pour arriver à Quillan.
J’ai profité de ce moment convivial pour parler avec certains autres participants qui semblaient connaître personne. Comme pour moi, pour eux c’était leur première réunion.
Et quelle diversité :
- Un pilote de montgolfière de Font-Romeu (Pyrénées-Orientales)
- Un couple d’Albi (Tarn) avec une résidence secondaire près d’Auzat (Ariège)
- Un artiste allemand du Mas d’Azil (Ariège)
- Une juriste de Toulouse, ancienne saisonnière à Ax Trois Domaines (Ariège)
- Un moniteur de canyoning de Luchon (Haute-Garonne)
- Un vétérinaire et sa femme du Gers, très impliqué dans le dossier ours
Pourtant c’est une diversité relative, et de grands pans de la population montagnarde étaient sous-représentés. Que l’assistance apparaît 100% d’origine européenne n’est pas en elle-même très surprenant.* Mais, à seulement 10%, les femmes étaient sous représentées. Heureusement qu’Aurélie Maillols était là pour redresser la balance. Vice-présidente de la région en charge de la Montagne et de la ruralité, c’est elle qui pilote tout. Quid des jeunes ? En regardant l’assistance, je voyais peu de personnes en-dessous de la quarantaine, Mme Maillols et son collègue Romain Pagnoux faisant exception notable.
Ce bilan de la diversité n’est pas une critique mais un constat : ce genre de réunion n’attire jamais tous les secteurs de la population. Le côté positif était, comme mon échantillon souligne, qu’il n’y avait pas que des institutionnels et des politiques. Et je me réjouis que les projets retenus visent un public plus large.
Le projet pour 2018
Si tout va bien, au 21 décembre 2017 la région validera la création du Parlement et votera le budget de fonctionnement.
Toute personne qui souhaite rejoindre le Parlement est libre de le faire en certifiant son adhésion à sa charte. Puis c’est au travail ! Peu de réunions, la plupart des rencontres sera dématérialisée. Jusqu’alors 384 acteurs se sont portés volontaires.
Il y a du pain sur la planche. Voici le repas montagnard :
Travail sur de sujets précis, à développer en groupes projets
- Faciliter la mise en œuvre d’initiatives publics/privés
- Développer la filière hédoniste
- Dé-précariser les emplois saisonniers, développer une offre de formation bi-qualifiante (l’outil groupement d’employeurs)
- Acceptabilité des projets d’énergies renouvelables en montagne
- Stratégie de communication du parlement de la Montagne autour d’événementiels et organisation d’une fête de la montagne
Travaux prospectifs, en format plénier :
- Pour des jeunes en montagne
- Approche transfilières pour fixer la valeur ajoutée
- Modèle économique des petites stations de montagne
- L’eau en montagne
- L’encadrement des travailleurs [entrepreneurs] indépendants pluriactifs.
Travail de contributions à des concertations en cours (en vue de 2019)
- Développer et faire connaître la ressource et la filière bois de montagne
- Reconnaissance et valorisation des aménités
- Intermodalité en montagne
- L’agriculture de montagne dans la renégociation de la PAC
[source : diapo présenté à la réunion]
D’ici 2018 il y a un autre rendez-vous important : les États Généraux du Pastoralisme, samedi 9 décembre, à Foix.
*Il convient de réfléchir à ce sujet. On peut se demander pourquoi la diversité de la population des grandes métropoles n’est pas représentée dans la montagne en tant qu’habitants, mais surtout en tant que visiteurs.
This entry was posted on jeudi, novembre 30th, 2017 at 5:00 and is filed under Non classé. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a comment below, or trackback from your own site.
Footprints on the mountains