De Gabas à Luchon sur le GR10
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[extrait du livre Les Pyrénées tout en marchant sur le GR10]
entre Gabas et Gourette
Je zigzag en suivant le sentier jusqu’au lac d’Anglas, un joyau d’un bleu vif, extravagant, au milieu d’une émeraude vif, fait de mousse. Au loin, se trouve une colonie d’une trentaine de marmottes, bondissant dans un creux, surgissant ou se tapissant d’un bond au milieu des rhododendrons en fleurs, s’enfuyant avant de revenir dans la mêlée. J’avance avec précaution mais l’une d’entre elles s’envole ! Il ne s’agit pas de marmottes mais de vautours. Plus exactement : de vautours fauves, et bien plus gros que je ne croyais (deux ou trois mètres de large d’un bout de l’aile à l’autre).

Lac d’Anglas, au dessus de Gourette
Jetant un œil en l’air, j’en vois d’autres arriver, qui dessinent des cercles en haut dans le ciel, examinant la scène. Sur le sol, l’un court en haut de la colline, en battant des ailes sans succès, plus pour garder les vautours à distance que pour s’envoler. Un cou blanc et curieusement pelucheux protège son plumage marron tacheté des éventuelles gouttes.

Vautour fauve
Vautour fauve
Les autres émettent une sorte de jacassement rauque qui s’intensifie tandis que j’approche puis, dans un bruissement dramatique, une ombre sombre, battante, s’élève dans le ciel. Ils laissent derrière eux un cadavre. Les os des membres ont été totalement décapés mais les côtes sont toujours dégoulinantes de sang séché. Il ne reste pas grand-chose des entrailles, à part un large sac de chair marron et suintant. La laine a été arrachée le long du cou pour faire apparaître une gorge rose et pour l’instant indemne. La tête, à l’exception des yeux, est intacte. La puanteur m’empêche d’examiner la carcasse de plus près.

Près du lac d’Anglas. Les vautours n’en laissent pas grande chose.
Comme je viens de le constater, les vautours sont des créatures grégaires. Une fois qu’ils ont identifié leur objectif, ils crient et une chute soudaine invite les autres convives, le festin peut alors commencer. En principe, les vautours ne mangent que des animaux morts (moutons, agneaux, veaux, et des animaux sauvages). Mais récemment, des éleveurs ont commencé à dire qu’ils s’attaquent également aux faibles agneaux et veaux nouveau-nés, et même à leur mère, épuisée en mettant bas. Il n’y a qu’une poignée d’incidents chaque année, ce qui semble trivial quand on compare à la population de bétail qui se mesure en centaines de milliers. Mais la question a donné lieu à un débat animé, second sur la liste des débats haineux, juste après le conflit autour de la réintroduction des ours…
Footprints on the mountains