Dans la vallée du rio Caldarés, au-dessus des Baños de Panticosa
Après quinze ans arpentant les Pyrénées tous les quinze jours, je pense savoir ce qui m’attend. Le 22 juin il n’y aura plus de neige en-deçà de 2800m, bien au-dessus des cols que je vais emprunter. Les glaciers seront en train de rétrécir tout en déversant des torrents d’eau sur la plaine. Je me demande si j’aurai vraiment besoin de mon pantalon long. Mais l’hiver centenaire 2012/2013 a tout chamboulé. Je finis par fourrer la doudoune, les gants, les crampons et le piolet dans mon sac déjà trop lourd.
Je me rends compte que je ne sais pas comment m’arrêter en cas de glissade sur la neige. Aussitôt je fais une recherche sur YouTube et commence à m’exercer en cachette dès que ma femme sort de la maison – histoire de ne pas l’inquiéter. D’abord j’étends une serviette duveteuse blanche sur le parquet dans la chambre, me disant que c’est de la neige. Puis je m’allonge sur le dos, la tête du piolet bien tenue dans ma main droite. Je ferme les yeux. Tout d’un coup, je commence à glisser sur une pente glacée. Je saisis l’autre bout du piolet, plante la lame dans la serviette et bascule sur le ventre, entrainé par mon accélération. Je me lève sur les bras, enfonçant le piolet dans la serviette. En même temps je pose mes genoux sur le plancher. Les pieds et les crampons doivent rester dégagés : faut pas faire des tonneaux. Ça marche, je m’arrête instantanément.
La deuxième phase de ma préparation est moins physique : j’envoie un email à Phil de Hike Pyrenees. Je lis son blog régulièrement et je calcule que je passerai près de chez lui. J’espère qu’il pourra me donner plus d’informations sur les conditions. Il fait encore mieux. Viens nous rejoindre, répond-t-il.
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