Le bilan provisionnel des dommages d’ours sur le massif des Pyrénées françaises jusqu’au 31 août 2016 vient d’être publié. Malgré l’interprétation optimiste du rapport, les chiffres sont en hausse. (suite…)
Le bilan provisionnel des dommages d’ours sur le massif des Pyrénées françaises jusqu’au 31 août 2016 vient d’être publié. Malgré l’interprétation optimiste du rapport, les chiffres sont en hausse. (suite…)
Voici le dernier article sur les montagnes modernes : les Pyrénées 2.0.
On trouve un signal téléphonique dans certaines vallées et autour des stations de ski. Au-dessus de 2400m, oubliez le mobile, du moins en tant que téléphone. Justement, l’une des richesses de la montagne c’est la possibilité de se déconnecter. S’il vous plait.
N’empêche… mon appli favorite c’est le clinomètre
Puis on ne peut pas oublier le GPS. Pas seulement pour les randonneurs, mais aussi pour les animaux. De temps en temps un de la trentaine d’ours dans les Pyrénées en portera un, question de pouvoir suivre ses déplacements, mais actuellement aucun n’est équipé.
Pareille pour les chèvres. Moins de 200m/h elle rumine ; entre 200m et 1000m elle broute ; plus de 1000m et il vous faut sortir la ramener. Idem pour les chiens qui ne reviennent pas. Un bon chien de chasse vaut de l’or.
Tout bouquetin qui se respecte porte un collier GPS/radio qui vaut 2500€.
Voici le quatrième volet dans ma série sur le Pyrénées en évolution.
La vente directe du producteur au consommateur existe dans les Pyrénées, mais elle me semble moins développée qu’en Angleterre. Ici je voudrais simplement signaler quelques faits qui m’ont marqué lors de mes traversées de la chaine.
J’ai vu cette machine à traire mobile près du Col de Pause en Ariège. L’éleveur m’a expliqué que les vaches montent au fur et à mesure que la saison avance, à la recherche de l’herbe fraiche. Au lieu de les faire descendre à la ferme pour la traite, il fait progressivement monter sa machine.
Je viens de voir un nouveau film : ‘Les Pyrénées, de l’Atlantique à la Méditerranée’ (Connaissance du Monde – trailer ci-dessous) qui m’a fait réfléchir. Le film montre les Pyrénées dans toute leur beauté, le cameraman en extase devant la majesté des cimes. Ça coche toutes les cases. Faut le voir, surtout si l’on ne connait pas les Pyrénées.
Si je suis un peu déçu, c’est parce que le film est trop beau. Malgré la présence de bergers et d’ours, personne n’élève la voix, personne n’est vraiment en colère. Rien ne risquait de faire sortir l’assistance âgée de sa torpeur digestive. Les montagnes du film sont jolies comme une carte postale aux paysages retouchés à l’aérographe de nostalgie. Ne pas déranger.
C’est pas comme ça que je vois les Pyrénées. La montagne, ça change.
L’approche au Pic de Crabère est raide mais pas dangereuse. À côté de la Traversée des Pyrénées (GR10), on peut atteindre le sommet dans la journée mais en genéral les randonneurs dorment au refuge d’Araing et montent les 700m de dénivelé qui restent dans la fraîcheur du matin.
Heureusement, les accidents sérieux, c’est pas tous les jours.
Je viens de lire Feral [Devenu sauvage] de George Monbiot. Il revendique le rewilding, le réensauvagement de la planète : la mer, le ciel, la terre et les animaux. Il pense globalement mais il vise la Grande Bretagne. Entre autre, il veut réintroduire la mégafaune (les espèces animales de grande taille). Est-ce possible ? Est-ce même une bonne idée ?
Ici dans les Pyrénées françaises et dans les départements limitrophes il existe toujours des exemplaires florissants de mégafaune, d’autres sont menacées, certaines ont récemment disparues. Des ours ont été réintroduits contre la volonté d’un secteur signifiant de la population locale, d’autres espèces ont été réintroduites sans problème. Qu’est-ce que cela nous enseigne sur le réensauvagement ?
Le sanglier décroche le dix (sur dix) sur l’échelle Monbiot de pertinence, une combinaison d’intérêt écologique et d’acceptation probable : il pense que le sanglier à un beau avenir outre-manche.
Dans le département de l’Aude, où j’habite depuis vingt ans, se trouvent environ 30 000 sangliers, dont 10 000 sont tués chaque année. Mais, malgré ces chiffres et malgré les nombreux traces que j’ai vu, je n’en ai jamais vu un de près : un grognement très reconnaissable suivi d’un fort bruissement dans la broussaille est le plus près que j’ai jamais été.
Sur les cartes britanniques anciennes la zone entre le monde connu et terra incognita était souvent garnie de dragons. On n’en savait pas beaucoup, mais on savait que c’était dangereux. C’est là où Monbiot a élu résidence.
Dans son livre Feral, George Monbiot nous invite dans un étrange pays habité par l’ours, le loup, l’éléphant, le lion et bien d’autres fauves. Son discours surfe entre sa vie personnelle et l’avenir de la planète sur une vague parfois optimiste, parfois désespérée. On le retrouve sur la crête des vagues dans son kayak ou bien pataugeant métaphoriquement dans les creux, là où les dragueurs ont détruit les fonds dans leur quête aux coquilles Saint-Jacques.
C’est un voyage troublant dans un livre bien ficelé, plein de perspicacité, même si quelques-unes des propositions relèvent de la fantaisie.
La conservation, dit-il, ne suffit pas : il faut remonter le temps, organiser le réensauvagement, créer des zones où la nature peut trouver sa voie. Des plantes (surtout les arbres), des poissons, des oiseaux et des animaux seraient réintroduits. La grande question : quelles espèces ont droit de résidence dans le paysage britannique surpeuplé ? (Je dis ‘britannique’ mais Monbiot vise plutôt le Pays de Galles et l’Écosse.) Sa liste comprend, entre autres, le sanglier, l’ours, le loup, le lynx, le lion et l’éléphant, tous ayant vécu en Grande Bretagne dans le passé. Il veut aménager les cascades trophiques (où les grandes animaux mangent les petits) – soutenant la thèse que la réintroduction de grands prédateurs est la meilleure façon de soigner un monde naturel déséquilibré. Notre idée de la nature, poursuit-il, est informée par ce que nous avons vu en tant qu’enfant. Mais chaque nouvelle génération apporte une nouvelle dégradation. Le point de repère n’est pas fixe, il se décale. L’état ‘naturel’ de la prochaine génération est moins authentique que celui de la précédente. Un réensauvagement programmé inverserait la tendance.
Il considère chaque espèce sur sa liste, lui octroyant un chiffre sur une échelle allant d’un à dix. À en croire Monbiot, le sanglier (10/10) est très apte à la réintroduction en Grande Bretagne et va pas provoquer un lever de boucliers. Le lion, par contre, est évalué à un sur dix. Monbiot n’est pas trop optimiste sur son accueil dans les banlieues.
L’exposition « Ours, mythes et réalités » vient d’ouvrir ses portes au Muséum d’Histoire naturelle de Toulouse. Installée dans une caverne au sous-sol, l’exposition a tout pour plaire : des plus petits qui trouveront un carrousel miniature et d’autres jeux, aux adultes avides d’une perspective globale sur le problème des Pyrénées. Les seules personnes qui risquent de se sentir laissées pour compte sont les éleveurs montagnards qui, eux, voient les dégâts de ‘Martin’, un des surnoms de l’animal en question.
Comme il se doit au Muséum, l’exposition se positionne clairement pour la cohabitation ours–homme.
« Les enjeux liés au maintien de l’ours dans les Pyrénées vont au-delà de la conservation de la biodiversité et reposent avant tout sur la recherche d’une cohabitation entre la diversité des activités humaines et la gestion de la faune sauvage sur un territoire à partager. »
Et ne rechigne pas à appeler aux sentiments :
« Parce qu’ils ont toutes les formes du bébé : une truffe, des oreilles, un ventre rond et pas de crocs quand leur bouche est fermée ; les ours déclenchent un sentiment d’infini tendresse – Boris Cyrulnik.»
Cette dernière citation est accompagnée d’un jeu d’hologrammes, l’une avec un homme que se cache derrière un arbre. Selon le point de vue, c’est soit un homme, soit un ours. Ou bien l’autre, une femme allaitant son bébé qui devient une ourse avec son ourson.
Après Bagnères de Luchon, notre prochaine escale est à l’Hospice de France, où nous allons passer la nuit. Rouvert en 2009, à ses débuts le gîte était une étape sur le chemin de St Jacques de Compostelle, puis un refuge pour les premiers montagnards partant à l’exploration du massif de la Maladeta.
Comme le musée à Luchon, le gîte abrite une relique qui parle de l’histoire des Pyrénées. C’est aussi une question de mort, dans ce cas de meurtre. L’arme est visible dans la salle à manger de l’Hospice ; nous avons déjà vu le cadavre, tenant compagnie avec Barrau au musée. L’arme est un collier avec une chaîne ; la victime est un ourson.
L’ourson et sa sœur ont été découverts près de l’Hospice de France et « ont été ramenés à l’Hospice où on leur offrit en guise de bienvenue un biberon de lait. » (La Dépêche du Midi, 27 mai 1952).
« Et après on les tua ! »
Ce nouveau livre de David Chétrit (Éditions Privat, 2012) est destiné à devenir une référence sur le sujet, bien que je trouve certaines propositions curieuses : on n’a pas nécessairement besoin d’être totalement en accord ni avec son discours ni avec ses conclusions pour reconnaître le travail de recherche impliqué dans cette œuvre bien documentée.
Pour reprendre la quatrième de couverture : « Allant bien au-delà du débat « anti- » et « pro- » ours, cet ouvrage, fruit d’un travail d’investigation, revient sur l’histoire et ses différents acteurs. » Ce qui donne l’impression d’un discours neutre. Que nenni. Il s’agit d’un livre à charge. Les accusés sont le ministère de l’Environnement et les associations de protection de la nature ; l’accusation porte sur la manipulation de l’opinion publique et le mépris des règles démocratiques.
Avec une dédicace aux bergers et des rubriques intitulées telles « Quand les capitaines quittent le navire, y-a-t-il un pilote dans l’avion » ou bien « Viol en réunion avec préméditation » il est clair que la neutralité académique n’est pas de mise.
Le livre retrace les quarante dernières années de l’histoire de l’ours dans les Pyrénées, s’appuyant souvent sur les documents émis par les différents acteurs. Ici, je veux reprendre certains des passages les plus intéressants.
Comme le dit Chétrit, ce n’est pas que les Pyrénéens qui ont chassé l’ours. Ce sont également les Auvergnats, les Savoyards, et aussi les Parisiens ! Tout le monde a chassé l’ours, et cela pendant des millénaires. Il était présent partout.
Déjà en 1891 un zoologue allemand s’inquiétait pour l’avenir : « Les beaux temps de l’ours sont passés. L’espèce ne peut plus demeurer que dans les lieux que l’homme n’a pas encore envahis… l’extension toujours croissante de l’homme sur la Terre chasse l’ours, et finira par le détruire complètement, du moins dans l’Europe centrale et méridionale. » (p. 17) À ce moment-là, il n’y avait que 100-150 ours dans les Pyrénées. Déjà à la limite de viabilité.
En fait, les Pyrénées sont le dernier bastion de l’ours ; il y avait une cohabitation qui n’existait pas ailleurs en France. Mais, aujourd’hui ce n’est que les Pyrénéens qui sont considérés fautifs.
(suite…)
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